Portfoliogo

Je n’avais pas de galerie «un peu complète» des logos que j’ai conçus au cours des 25 dernières années, c’est maintenant chose faite ici.

Bonne visite!

Pruneau cru

Hier soir, c’était le Jour de la Terre, mais aussi le retour du Cabaret des auteurs du dimanche. Le thème était pruneau. Voici le texte volontairement désagréable que j’ai lu et qui a fait un beau frette.

Je vais tout de suite mettre quelque chose au clair : je suis pas là pour me faire haïr. Mais je vais essayer.

Vous êtes ouverts d’esprit et convaincus d’avoir zéro tabou? OK. Alors si on parlait de votre immaturité alimentaire?

Je vous regarde et je vois des enfants hyperactifs qui veulent leur chocolat mais pas leurs brocolis parce que c’est paaaas bon! Si je vous dis que la poutine est du junk, vous allez sauter dans la colère ou le déni. C’est correct, c’est les deux premiers stades du deuil. Un jour, peut-être, vous comprendrez que votre corps mérite mieux qu’un mélange indigeste de trois mauvais ingrédients.

Vous mangez comme des bébés. Vous avalez la boulechite du marketing agroalimentaire qui dit que se nourrir c’est pas un besoin physiologique mais un réconfort. Un plaisir facile, qui concerne juste vos papilles et votre pseudo-bien-être. Elles ont 5 ans d’âge mental, vos papilles, elles se foutent complètement de ce qui arrive une fois qu’elles ont joui! Passée l’extase chimique, tout s’évacue dans cette sombre poubelle qu’est l’œsophage. Vite, de la place pour autre chose!

Je sais, vous respectez religieusement le Guide alimentaire canadien et ses quatre groupes : le salé, le sucré, le chimique et le gras.

Vos grands-parents ont connu la grande noirceur et la peur de manquer, alors ils outremangeaient. Vos parents ont adopté le tout-chimique, parce qu’une usine, c’était plus rassurant qu’un potager. L’Homme avait vaincu la Nature. Mais vous, là, ça vous tenterait pas de faire la paix avec votre nourriture? You are what you eat, quelqu’un?

On n’est plus à l’époque où les riches mangeaient pendant que les pauvres crevaient. Aujourd’hui, les riches mangent pendant que les pauvres bouffent.

D’ailleurs, IGA résume super bien l’air du temps avec son slogan très classe : «Vive la bouffe». Laissons la nourriture aux snobs et célébrons les affaires louches qu’on se met dans la gueule et qui sont en spécial dans la circulaire!

Parce que vous exigez que ça «goûte le ciel», l’industrie vous fourgue des exhausteurs de goût, surtout l’aspartame et le glutamate. Ça tombe vraiment bien : le premier serait à l’origine de cancers et de naissances prématurées, et l’autre est soupçonné favoriser la dégénérescence du cerveau et d’augmenter les risques d’Alzheimer! Vous allez donc mourir de malbouffe, mais vous vous rappellerez plus pourquoi!

Je peux vous le dire parce que j’ai rien à vendre : vous confondez plaisir et orgie. Si «fêter», c’est s’empiffrer et se soûler, il y a peut-être un autre genre de vide à combler?

Le dieu sucre. En guise d’églises, vous lui avez bâti des cabanes. Un petit conseil, en passant : mangez des fibres. Parce qu’après le temps des sucres, c’est le temps des selles!

Et LE BACON! Tout est tellement meilleur avec du bacon! Le bacon, c’est l’amour, le vrai, celui du cœur. Parlant de cœur, vous savez ce que le bacon fait à vos artères, huh? Il les aime, il leur fait un gros gros gros câlin!

Vous êtes pas tannés de vous faire engrosser par la bouche? C’est quoi, les plus grosses fortunes de l’«alimentaire»? La numéro 1 vend surtout du sucre et de l’huile. La deuxième, c’est Coca-Cola, vous savez, le truc qui sert à dérouiller des clous? Me-noum.

Pourquoi tous les gars ont une bédaine de bière dès 25 ans? Parce que ça prend deux heures de hockey pour compenser les calories d’une seule «petite» bière. Alors extrapolez : deux bières, trois bières, cinq bières… Là, je vous entends me dire «ma blonde, elle la trouve cute, ma petite bédaine…» Hum. On parlait de déni?

Mais y’a pire. L’autre soir, j’étais à un party de créatifs à la SAT. Le bar tournait full pin, il y avait des stands de bouffe «urbaine». Des burgers réinventés. Des kébabs déstructurés. Des salades hipsters. Mais qu’est-ce qui excitait ce beau monde? Le bar à bonbons! Les dents m’en tombent.

La réponse à la malbouffe, c’est pas le sans gluten, ni le paléo, ni le low-carb. Mûrir, c’est pas faire attention à ce qu’on mange, c’est SAVOIR POURQUOI on mange. Spoiler alert : pour rester en vie. «Faire attention à son alimentation» est une absurdité. Après vingt siècles de civilisation, on devrait en être rendus à produire/acheter de la nourriture qui se peut, plutôt que se faire décerveler d’un bord par des fabricants de nananes toxiques, et de l’autre par les pushers de diètes. On devrait avoir compris que manger, c’est pas une récompense ni une vengeance. Qu’une émotion, ça se mange pas : ça se communique. Qu’échanger un bon comportement contre un pogo, que priver un enfant de dessert, c’est créer des associations malsaines dont le kid ne se défera peut-être jamais. On devrait faire la paix avec ce héros méconnu qu’est notre tube digestif. Et être adultes, pas au sens beige : adultes au sens en contrôle de notre shit.

Si tu crois être à l’écoute de ton instinct quand tu manges l’immangeable, j’ai un conseil pour toi : écoute mieux. La merde est supposée sortir de toi, pas y entrer. Mais bon, il faut bien se faire plaisir de temps en temps, comme disait le chihuahua en zignant la jambe à grand-maman.

Votre immaturité alimentaire m’a flabergasté à chaque fois que vous avez décidé que votre entraînement vous donnait droit à un sac de chips ou à un kilo de crème glacée. Mais vous vous êtes surpassés dans vos lendemains de brosse, quand vous avez gémi que votre corps réclamait du gras et du salé. Ça là, c’est de la mythomanie gastrique.

Mais je suis qui, moi, pour vous dire tout ça? Prenez donc vos infos chez les vrais spécialistes. Ça tombe bien, les nutritionnistes passent même à TLMEP! Ils vous confirmeront que les régimes miracles, c’est de la connerie, comme les détox et les superaliments. Le pruneau, lui, contient de la vitamine A, C et B6, du calcium, du fer et du magnésium.

Vous me trouvez baveux? Au moins, ma bave est sans gras trans ni OGM!

Logos, plagiats et coïncidences

Mardi prochain, 27 mars 2018, je présenterai pour la première fois ma nouvelle conférence, Logos, plagiats et coïncidences.

C’est un sujet que je porte depuis longtemps, demandez aux gens que je fatigue inlassablement avec ça et qui se disent bon, il n’était pas complètement mythomane, il la donne pour de vrai, sa maudite conférence.

À quoi vous attendre? En gros, à ceci. Deux logos se ressemblent : est-ce le fruit du hasard ou d’une copie délibérée? La réponse est-elle vraiment simple? Des millions de logos peuplent désormais notre quotidien… sont-ils tous uniques? À travers de nombreux exemples, essayons de comprendre le pourquoi d’une ressemblance. Comprendre ce qu’une entreprise risque à voler une identité existante. Comprendre comment un designer peut – ou pas – s’assurer que sa création est originale. Comprendre que la création dépasse le champ du marketing pour interpeller la psychologie de la perception. Comprendre aussi pourquoi, à l’heure des médias sociaux, les logos cristallisent les opinions.

On m’a demandé à qui s’adresse cette conférence. Le premier public, ce sont mes camarades créateurs d’images de marque, ainsi que tous ceux qui sont impliqués dans des missions de branding. Les professionnels les plus aiguisés – il y en aura dans la salle! – n’apprendront peut-être pas grand-chose, mais ils devraient êtres divertis par l’arc narratif, comme on dit! En bon vulgarisateur, je me suis assuré de décortiquer les notions les plus techniques et de laisser toute la place aux exemples, aux anecdotes, aux blagues et aux réflexions socio-visuelles. Alors n’importe quel cerveau ayant un minimum de curiosité devrait être intéressé.

Consolez-vous si vous n’être pas dispo mardi, je tâcherai de trouver d’autres occasions de présenter cette conférence.

Les billets sont en vente ici.

N’oubliez jamais : copier, c’est mal.

Infoman et la carte soleil

En ce 25 janvier 2018, j’ai été invité à commenter le (non)design de la nouvelle carte d’assurance maladie québécoise, au micro de Jean-René Dufort. Une expérience fort agréable.

Je remercie Infoman d’avoir fait confiance à mon expertise, même si je ne suis pas (encore) la bête médiatique qu’est Mathieu Bock-Côté! Si tout va bien, je deviendrai le nouvel expert des événements graphiques – designs controversés, logos ratés, affiches immondes –, prenant ainsi le relais de feu le grand Frédéric Metz! Ouais, la barre est haute, mais j’ai des ressorts sous les semelles.

Si vous êtes au Canada, l’émission complète est visionnable en cliquant ici, et mon intervention commence à 17:57.

Pour voir la partie de l’émission où j’interviens, c’est ici :

 

Si ça ne fonctionne pas, essayez YouTube.

Les 17 meilleurs et pires logos de 2017

2017 pourrait s’inscrire dans les annales comme l’année où les logos ont laissé la place aux systèmes d’identité visuelle au milieu desquels le logo n’est souvent qu’un élément neutre et flexible. Cela dit, jetons un œil subjectif aux meilleurs et pires logos de l’année, d’ici et d’ailleurs!

LES MEILLEURS

Suite de l’article sur Infopresse

Le pouvoir de dire non

Voici le texte que j’ai lu au Cabaret des auteurs du dimanche, sur le thème POUVOIR.

* * *

J’ai toujours haï les militaires. Probablement parce que j’aime les nuances, et que dans l’armée, tu n’as que deux choix : être le connard qui commande ou le crétin qui obéit. Oh, je sais, vous allez me dire que les militaires sont le rempart qui nous protège en cas de guerre, les héros qui sauvent les démocraties menacées. Mais contre qui se battent les soldats, hein? Contre des soldats. La solution égale le problème. Boom.

J’haïs les militaires parce que je suis le genre d’irresponsable qui prône le pacifisme, le genre d’emmerdeur qui a besoin de comprendre avant d’obéir.

J’haïs les militaires et j’ai connu la malédiction de naître dans un pays et à une époque où les jeunes hommes devaient obligatoirement faire leur service militaire. Ça, c’est un an de ta jeunesse que tu passes à désapprendre la vie dans un camp de jour sous-équipé. Tu te soumets 24/7 à des douchebags qui te hurlent des ordres à la con, et dont la mission n’est pas de sauver un pays mais de faire de ta vie un enfer. Ou, comme disent les anciens, de t’aider à devenir un homme, un vrai.

Si tu fais des études, tu peux repousser ton service jusqu’à tes 22 ans. Ensuite, le seul objectif salutaire, c’est de te faire réformer, ce qui te donne au moins UNE occasion de regretter de ne pas être aveugle, épileptique, paraplégique ou trisomique. Tu dois donc faire preuve de subtilité et jouer le handicap invisible : la maladie mentale. La maladie mentale LOURDE, parce que la légère est plutôt un atout, dans l’armée.

Si je peux me permettre de vous raconter tout ça, c’est parce que je suis trop loin et trop vieux pour qu’ils me repêchent.

Flashback. À 22 ans, je suis convoqué. Je contacte une psychiatre civile pour qu’elle m’écrive une lettre de complaisance, moyennant finance. Le scénario est simple : comme je ne peux pas prétendre être débile vu que je fais des études supérieures, je suis lourdement carencé du côté affectif et hyper dépendant de ma maman. Je ne survivrais pas 48 heures dans un régiment, genre. En me signant la précieuse lettre, la psy me recommande de ne surtout pas «jouer le débile», parce que les médecins militaires n’aiment pas qu’on se foute de leur gueule.

Par un beau matin ensoleillé, j’arrive à la caserne, en banlieue parisienne. Je suis beau à voir : cheveux gras avec raie sur le côté, lunettes de nerd, anorak zippé jusqu’au cou, pantalon trop court, le parfait portrait du jeune homme habillé par une mère en perte cognitive.

Je suis censé passer deux jours dans ces locaux hostiles en m’efforçant de ne regarder que mes pieds. On commence par nous formater collectivement, ce qui consiste en gros à nous faire sentir comme des déchets. On nous assoit ensuite dans une salle de classe pour les évaluations psychotechniques. Comme je suis supposé être intelligent malgré mon look de dessous de bras, je réponds de mon mieux au test écrit. La cloche sonne avant que quiconque ait fini. Peu importe, j’apprendrai plus tard que j’ai eu 100%. On me propose alors de suivre une formation d’officier, ce que je refuse, à la grande surprise de plusieurs de mes camarades qui ont eu des notes de merde mais rêvent de faire partie des ti-chefs.

Vient ensuite la visite médicale, une sorte de déambulation au salon du malaise, où chaque stand te propose une activité : pesée, prise de sang, mesures, rythme cardiaque, tension, exploration du fond des yeux et du fond du slip. Un. Vrai. Rêve. Je rate mon test d’urine car mon personnage – oui, c’est un PERSONNAGE – est trop perturbé par l’absence de sa mère pour pisser dans un tube.

Ensuite, direction le test d’audition. Ça fait quelques minutes que je suis derrière un jeune chevelu qui n’a visiblement pas consulté la même psy que moi parce qu’il joue au débile profond. Je n’embarque pas dans  son sketch de psychodramaqueen mais j’ai beaucoup de mal à ne pas rire. Il passe maintenant dans la cabine sourde qui sert à évaluer l’acuité auditive. Il entre, s’assoit lourdement sur le tabouret, face à la vitre qui le sépare de l’opérateur, et se met les écouteurs sur le front, sans jamais arrêter de loucher. Je me mords les lèvres. L’opérateur, qui trouve ça moins drôle, entre dans la cabine pour lui remettre le truc sur les oreilles. En principe, la future recrue doit lever la main à chaque fois qu’il entend un son. L’opérateur commence à manipuler ses contrôles, je devine qu’il aurait dû voir une main se lever depuis bien longtemps, et que ti-clown doit maintenant avoir l’équivalent d’un Boeing dans les tympans. Et puis, halleluya, le comique lève un bras comme une marionnette! Ma lèvre inférieure est en sang. Tant pis, je ferai passer ça pour de l’auto-mutilation.

Je finis la visite médicale devant un médecin militaire à qui je remets la lettre cachetée de la psy. Il la lit en silence devant moi, visiblement frustré de devoir priver la France d’un si fier soldat. Il ne peut se permettre de renverser l’avis d’une psy qui est supposée me suivre depuis des années. Qu’à cela ne tienne, il se vengera probablement sur mon ami le tragédien, que je devine moins bien équipé que moi pour la fraude psychiatrique.

Je n’ai reçu la confirmation de ma liberté qu’après plusieurs semaines d’attente. J’étais «P4», c’est-à-dire réformé pour motif psychologique de niveau 4 : le plus haut grade de mongol!

J’ai eu droit à un bisou de ma maman et à l’acquiescement silencieux mais viril de mes grands frères, tous les deux réformés.

Cuisiner les cochons

À la demande insistante de ma Mireille préférée, je publie le douze-pieds-par-douze-pieds que j’ai écrit dans le confort de mon foyer, pour voir si j’étais encore capable de relever ce défi en alexandrins au Cabaret des auteurs du dimanche. Les mots en gras m’ont été imposés par Mireille.

* * *

Chers amis, nous voici rassemblés dans cette boîte,
Tous les sens en alerte et les oreilles moites,
Informés par la presse d’un automne croustillant
Où des violeurs célèbres se font prendre par le gland.

Un roitelet pompette, tout en haut de l’affiche,
Qui exhibait son zguègue et pelotait des miches,
Doit rendre son micro et rabattre calotte
En attendant le jour où il paiera sa note.

Cet autre roi du rire, juste pour le calembour,
Dont les sens s’expriment, sauf le sens de l’humour,
Devra finir au max, bardé de contentions,
En braillant C’EST FINIIII! dans le fond d’une prison.

La culture du pouvoir est-elle un alambic
Qui distille la morale des personnages publics
Et les pousse à agir en pervers forcenés,
Laissant dans leur sillage des vies traumatisées?

Ou bien est-ce au contraire la première qualité
D’un aspirant dragon que d’être assez fucké
Pour prendre sa queue comme une tapette à moustiques
En soumettant les faibles à son pouvoir lubrique?

La gloire est une drôle de péripatéticienne,
Qui viole des volontés pour assouvir la sienne.
Il est grand temps que sonne l’heure de la punition
Et qu’une vraie justice cuisine ces cochons.

* * *

D’autres 12 pi x 12 pi peuvent être consultés ici et .